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jure, aucun étonnement, quand il reprit d’une voix sans couleur :

— Benjamin… je suis un habitant de la Lune !

Puis il continua sa marche.

Alors, je dis :

— Mais Monsieur Brunschvicg, vous êtes le premier sur la terre, n’est-ce pas ?…

Il m’interrompit, souriant toujours :

— Suis-je le seul à enseigner la philosophie ?…

À ces mots, sa voix, déjà décolorée, s’éteignit ; il pâlit encore, s’estompa, et brusquement se confondit avec l’air de la nuit, tout éclairée de rayons.

J’appelai :

— Monsieur… Monsieur Brunschvicg !…

J’étais seul dans le jardin, avec le clair de lune.

À la lueur de ce rêve de ma jeunesse, j’ai mieux compris, cette année, l’incompréhension du cours de M. Brunschvicg. Certes, il joue, lui aussi, son rôle dans notre Farce, mais un rôle en marge, qu’il faut accompagner d’un air de flûte et d’un décor