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des sources, et sentir la caresse du vent en mangeant du fromage à la crème… Terre et ciel ! Si vous entrez chez M. Puech, dans quel état d’amertume vous sortirez !… Qu’est-ce que M. Puech ? Qui dira d’où il vient, où il va, ce qu’il pense, ce qu’il fait ? Pauvre Grèce ! France infortunée ! Lamentable Sorbonne !

Ce qui me cause le plus de souffrance, quand j’entends M. Puech, c’est qu’il se rend compte de sa pauvreté. Son regard honteux, sa voix vacillante, son air d’égarement, sont comme une prière au public : « Je vous en supplie, ne m’écoutez pas !… Rêvez à vos affaires, à vos amis… Prêtez l’oreille à votre imagination… si vous en avez. Moi, je n’en ai aucune : je suis bien malheureux… Il faut que je vous commente l’Idylle III de Théocrite, et il ne me vient pas une idée, pas la moitié d’une !… Quatre pages, sur lesquelles il faut que je parle une heure !… J’ai eu beau arriver en retard de dix minutes, il m’en reste cinquante !… Un siècle !… »

Éperdu, il regarde l’horloge. Il ne cessera