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GASPARD

— Il faut que j’arrive avant la nuit : pour les sentinelles, je n’ai que le mot de jour… vous, vous aviez de bonnes figures : je n’ai rien dit : Mais si j’en vois avec de mauvaises têtes, je ne suis pas longue à crier : « Turenne ! »

Ils dirent en même temps :

— Turenne ? C’est pas Turenne aujourd’hui.

Elle fit, plissant le front ;

— Ce n’est pas Turenne ?

— C’est Marceau.

— Marceau ?…

Et elle les regardait dans le blanc des yeux. Est-ce qu’ils ne la trompaient pas ? Alors, Gaspard la saisit brusquement et lui mit un gros baiser maladroit sur la joue, répétant :

— Mais voui, c’est Marceau !

— À moi l’autre joue ! dit Burette.

Et lui la prit par la taille, d’une main indiscrète, qui monta jusqu’à la petite poitrine si bien moulée et si tentante.

Elle leur échappa en riant. Elle faisait : « Au revoir ». Et ils restèrent un peu benêts à se regarder l’un l’autre, les mains ouvertes, les yeux brillants, se redisant :

— Ah !… Elle est mignonne !…

— Si elle est mignonne !

— Sans blague, elle est mignonne !

On vint les relever. Ils n’étaient pas remis de