s’en allait de son pas balancé de grand Parisien, se disant seulement :
— Où qu’on nous mène ? Qu’est qu’ c’est qu’ tout ça ?
Le régiment traversa deux villages organisés pour la défense, de vieilles charrettes barricadant à demi la route. Des patrouilles de dragons, les hommes tout secoués sur leurs bêtes au galop, débouchaient tout à coup d’un chemin creux ou d’un champ. Les fantassins se garaient, pestaient, dédoublaient les rangs, puis couraient avec un bruit de gamelles pour rattraper la colonne.
Moreau ronchonna :
— Qué cauchemar ces frères-là, avec leurs bourrins !
Puis, la fatigue tua les idées. Après trois heures d’une marche rapide et presque haletante, par une nuit molle, ces hommes ne songeaient plus à l’ennemi invisible, mais seulement à leurs pieds, à leurs reins, et au bonheur de s’arrêter.
— C’est pas possibe, dit Gaspard qui traînait la patte, ils sont tous foutus le camp. On va-t-être à Berlin d’main matin.
— Serais-tu fatigué ? demanda le capitaine Puche.
— Moi ?… Oh, c’est pas que je soye fatigué… J’ dis ça… quoi, c’est pour dire.
Mais quand, au petit jour, on fit halte enfin