Page:René Benjamin - Gaspard, 1915.djvu/300

Cette page a été validée par deux contributeurs.

chose ed plus qu’les aut’es ; pas la peine : suffit d’quèque chose ed moins !

Il goûtait son vermouth, s’essuyait la moustache, criait :

— Patron, il sent rien vot’e truc ; faudrait pas m’servir ça comme pour une tite pucelle !

Le patron, crispé par une grimace, répondait : « Voilà… je viens… »

Gaspard haussait les épaules : « Sacré pirate ! », et poursuivait :

— Après l’hosteau, on m’a mis en convalo au château (tiens, c’est des vers c’que j’dis là, c’est mignon !) Là alors, on est heureux comme des lentilles dans l’eau ! C’est la vie époustouflante. J’me crois millionnaire : un lit à trois personnes, des savons qui sentent l’actrice ; pis des r’pas… ça des r’pas qu’on en voudrait êt’e ruminant. Quant au marquis, ct’une vieille baderne, mais l’est bon zig comme pain bénit. L’matin, il vient nous voir au pieu. Il dit comme ça en bavant : « Alors ?… Alors ?… » J’y sors mon moignon ; j’y fais : « Ben alors… alors… ça a pas encore repoussé cte nuit ! » et il s’met à s’tordre comme une tite folle. Ah ! c’t’un numéro !

Gaspard, par ses récits verveux, devint célèbre dans M… La clientèle du Café des Hirondelles s’augmentait. L’huissier amena le juge de paix ; le bijoutier amena le marchand de grains. Et le