Page:René Benjamin - Gaspard, 1915.djvu/292

Cette page a été validée par deux contributeurs.


VIII


L’hiver avait été cruel pour Gaspard. Le printemps lui fut léger.

Il le vit naître et s’épanouir dans le vaste parc de M. le Marquis de Clerpaquec, dont le château, sur le flanc de M…, domine toute la verte campagne normande. Verte et blanche et rose, quand, aux premiers jours de mai, pommiers et poiriers sont en fleurs ; et M… est une petite sous-préfecture curieuse et charmante, perchée, tassée, si drôle sur son gros pâté de terre qui domine le pays. — On ne s’est pas battu depuis la Ligue dans ces herbages frais, dont le sol est riche et gras ; et Gaspard, amputé, pensa tout de suite que la vie en Normandie avec une jambe, était beaucoup plus douce qu’en Argonne avec deux.

Il se trouvait en convalescence chez le Marquis de Clerpaquec, un homme vieux, riche, attendri, qui avait mis son billard, un salon et une vérandah à la disposition de la Croix-Rouge, disant :