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GASPARD

— Moi, j’attends l’ ballet, dit Gaspard, et c’est nous qu’on dansera avec les p’ tites Allemandes.

— Et moi ? demanda Burette.

— Toi, t’ seras de l’Apothéose !

Un rire général répondit, et trois piles de bonnets de coton filèrent par la fenêtre en culbutant, comme s’ils se tordaient aussi.

— Bonnets de nuit ? En été ? dit Moreau. Pas la peine !

— S’pèce d’andouille, fit Gaspard, et pour passer le café ?

C’était fini. Magasin vide ; les planches nues ; tout raflé. Il prit la pancarte qui portait le numéro de la compagnie, et il la pendit à la fenêtre après avoir écrit dessus : À louer, — en meublé.

Quand tout fut porté à la compagnie, il organisa son magasin, avec une prestesse et une ingéniosité qui étourdirent le capitaine, homme à l’âme tranquille et à la cervelle minutieuse.

— Qu’ mon capitaine s’ fasse pas d’ mousse, dit Gaspard, mais qu’il m’envoie les bon’hommes un à un, et en ordre !

Le capitaine s’exécuta. Alors, la chemise bouffant à la ceinture, dépoitraillé, et mains aux hanches, Gaspard faisait :

— Enfile ça ! Et t’ dépêche. Ben, ça va ? Oui, t’es beau !

— Un peu court… risquait l’homme.