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GASPARD

— Je vois, disait le professeur, que tu aimes les belles-lettres.

— J’aime tout c’ qu’est bath, reprenait Gaspard d’une voix enflammée… L’ phonographe, tiens, ah c’ que j’ l’aime aussi l’ phonographe !… Mais pour c’ qu’est des lectures, les Misérabes, j’ les ai r’lus sept fois. À m’sure, est-ce pas, j’ sais tout c’ qui va rarriver, mais chaque fois ça m’en bouche un coin d’ voir comment qu’ c’est dit. — Des bon’hommes comme Victor Hugo, ça, ça mérite d’être riches. Moi, j’y aurais fait cadeau d’ tout c’ que j’ai, sans blague ! pasque ça… ça m’emballe, des types comme ça, qui trouvent des choses comme ça !

Il se taisait un instant. L’autre était rêveur. Et Gaspard reprenait soudain :

— Au lieu qu’un adjudant… ben, un adjudant, il crèverait d’ faim d’vant moi, si j’avais un os, j’y donnerais pas !

— Tu te vantes, disait doucement le professeur.

Et Gaspard ne répondait plus.

La bonne tenue, l’air si décent, la mesure et le goût de cet universitaire, donnaient à Gaspard du respect, en même temps que de la confiance. Il le tutoyait, mais il ne l’appelait jamais par son nom tout court. Il disait « M’sieur Mousse », et il aimait l’entendre, comme Burette autrefois, expliquant : « Quand on écoute des types comme