Page:René Benjamin - Gaspard, 1915.djvu/180

Cette page a été validée par deux contributeurs.

monde, qu’il aurait crues oisives, trop riches… S’il y a quelques perruches, on le saura au Jugement Dernier : le peuple ne les voit pas.

D’ailleurs, un homme qui, comme Gaspard, a les yeux clairs et le regard droit, attire tout de suite autour de son lit les femmes les plus dévouées et les plus charmantes. On le trouve comique et si touchant ! On l’appelle « ce pauvre diable » ; on se démène pour lui faire plaisir. — Gaspard, durant deux mois, devait occuper trois femmes. Ces trois femmes, qui n’avaient de commun ni l’aspect, ni les idées, ni les sentiments, le sort les avait réunies autour des mêmes malades, comme pour prouver aux hommes qu’il existe au moins trois façons divines d’être femme.

L’une était la Bonté, l’autre était le Charme même, et la troisième était la Vie, vie de l’esprit, vie du cœur, vie du geste : on ne voulait plus mourir après l’avoir vue.

La première avait une figure si consolante et si modeste, qu’une cornette de sœur, qui n’aurait laissé voir que le sourire de la lèvre, la bonhomie du nez et la pureté du regard, aurait été bien digne de ce visage paisible, où se marquait une foi sans heurts, avec un dévouement sans réticences. Dans ses manières et sur ses traits, elle n’avait peut-être rien de rare, pour éblouir les yeux ; mais la vertu de son âme mettait une