— Des fous évacués… de Ville-Evrard.
— Ville-Evrard ! fit le boueux.
— Tu connais ? dit le chauffeur.
— Un peu, dit le boueux en se rengorgeant. J’ai mon oncle qu’était alcoolique, et qu’y a resté trois ans.
— Ben, on les espédie.
— Pourquoi ?
— Pour qu’ les Boches ils les chopent pas, s’ils arrivent… Et pis y en a qui s’est sauvé.
— Où ça ? demanda vite Gaspard.
— Par la campagne… Écoutez voir… Les gardiens ils les cherchent.
Ah ! pour le coup, ils s’en tordaient !.. Puis, ils dirent : « Mais on va les chercher aussi !… Tu siffleras hein, vieux, file pas sans nous. »
Et les voilà partis dans les champs, tout blancs de lune.
Gaspard, qui boitait, s’appuyait au boueux. Et le livreur, marchant comme un canard, suivait et criait :
— Attendez-moi… qu’on rigole ensemble !
À deux cents mètres de la voie, une ombre surgit. Ils s’arrêtèrent. L’ombre s’approchait.
— Ça y est ! Un fou ! dit Gaspard.
— Non, une folle ! dit le boueux.
Et ils riaient.
Pourtant, c’en était une : il y a des invraisem-