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GASPARD

— L’ plus cochon, c’est qu’ils s’arrêteront pas ! Poteau, peux-tu marcher ?

— Oh ! non… non !

— Si j’ te tiens ?

— J’aime mieux mourir là… Oh !… Oh !… Oui… Tu diras à ma petite femme…

— As-tu fini ! Tu t’ vois pas ; t’as une mine à vivre cent ans !… Quoi… t’as r’çu du plomb… Ben, voui, t’as r’çu du plomb… Pis après, on t’ l’enlèvera ton plomb.

Nouvel obus. Gaspard s’aplatit sur Burette, le couvrant de son corps.

— J’ai pas b’soin qu’ t’en reçoives d’aut’… Alors, coute un peu : faut décamper, y a pas. L’ village, maintenant, c’est pus pour nous. Nous, on est amochés. Tu vas m’ prendre par el cou, avec tes deux bras…

— Non !… Oh non ! Gaspard… ne me bouge pas… J’ai mal… si mal… J’aime mieux… que tu m’écoutes.

— C’est ça, parler ! Toujours ! T’es pas bachelier pour rien. Sont tous comme toi ceux du bachot. Tiens, j’ te demande pus si ça t’ plaît… J’ te prends.

— Non !… non !…

— J’ te prends… Serre-moi… plus fort… Allez, oust ! Pis en route !

Il ne pensait plus à sa fesse. Il jeta son sac et