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13 juillet 1937.

Ma chère Hélène,

Si l’on en juge au nombre de pages, ceci ne peut guère s’appeler une lettre ! C’est un rapport, un mémoire ! Vous allez croire que l’Allemagne m’a converti à ses mœurs et que je ne sais plus m’exprimer que par une thèse ! Grâce à Dieu, ceci est une lettre, où il n’y a pas une ligne qui ne s’adresse à vous. Je vous parle, je vous vois, je suis heureux,… je suis bavard !

Mon amie, je viens de faire un voyage important, qui ne vaut guère par le pittoresque des aventures, mais par les quelques idées que je rapporte. Je ne vais pas vous faire un récit au jour le jour, en me complaisant à des anecdotes, mais de mes rencontres je voudrais tirer pour vous… et pour moi quelques vues d’ensemble, qui résumeront ce que je crois comprendre.

Je n’avais pas vu l’Allemagne depuis la guerre. Je m’attendais, comme quand on arrive en Italie, à rencontrer le Dictateur d’abord, tout de suite. Nous sommes telle-