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Allez-ès, affronté ; vos avez s’tu ainsi avou et vos flairiz bin pé, ji mèn’es rappelle foert bin.

Et moi ça me fait enrager qu’on dise ça et qu’on me fasse un pareil affront ; alors je me jette sur Trinette et je la pince tant que je peux et je lui donne des coups de pieds dans les mustais pour lui faire des bleus en me tenant à sa cotte.

Quand on lui donne à manger, c’est presque encore plus laid ; y a-t-il rien de plus dégoûtant que sa bouteille de lait avec un tuyau et un tuturon tout noir.

On dirait le pé de notre noire vache, et lui il met ça dans sa bouche et il tire tant qu’il peut jusqu’à ce que la bouteille soit vide, et puis il ne veut jamais lâcher le tuturon, il pleure parce qu’on lui prend parce qu’il n’y a plus rien à boire tellement qu’il est pensâ. Alors, pour l’attraper, on lui donne un autre tuturon avec pas de tuyau ni de bouteille, et il tette du vent pendant bien longtemps, en faisant aller sa bouche et ses joues pour le bon, que moi je rie de tout mon cœur tellement qu’il est bête.

Mais on commence aussi à lui donner à manger des boleies pour lui apprendre sans doute à manger comme tout le monde, sans cela il ne saurait pas comment on fait, et il resterait toute sa vie à tetter son biberon, même quand il serait devenu un vieil homme. Alors Trinette met de l’eau chaude dans une toute petite pailette et un peu de la mie de pain avec et un peu de lait et elle chipote avec