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trouve pas, moi, que je grandis. Comme si ça se voyait ! Et pourtant ma grand’tante fait une figure, mais une figure ! Quand c’est qu’il me faut des nouvelles affaires parce que les vieilles sont devenues trop petites : Awet, èdon, i crèh’si pô, paret ! qu’elle dit chaque fois ; et elle serre sa bouche toute mince qui va bien loin dans ses joues, elle souffle fort avec son nez en faisant nenni, nenni avec sa tête. Puis elle me regarde sévèrement et je crois qu’elle va me donner une calotte pour m’apprendre et aussi pour me faire plus petit, sans doute. Mais qu’est-ce que j’en peux donc, moi ! Elle peut barboter tant qu’elle veut, ma tante, ça n’empêchera pas que je m’rafie d’être grand, un jour ; parce que j’ai tout plein des choses à savoir et à me revenger quand je ne serais plus petit. Et d’abord je voudrais déjà être assez haut pour prendre tout seul des allumettes sur le djiva et jouer avec.

Mais il me faudra encore bien rattendre, allez. Enfin, djan !

Cet hiver-ci voilà qu’il fait si froid qu’on n’a plus envie de se laver, au matin. Merci, aller tout se refroidir, être dibîhi (gercé) et encore du savon dans les yeux. Et puis on ne le voit pas. J’aime bien mieux raccourir devant le crama avec un paquet de tous mes affaires et me rhabiller tout près du feu. Comme c’est drôle : quand on met son mollet trop près du feu, ça pique, et quand on a froid très fort, ça pique aussi. Alors, à quoi ça sert ? comme c’est bête !