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Si un Infidèle de l’espèce des Harbi, était entré sans défiance sur le territoire musulman, parcequ’il aurait entendu quelques paroles par lesquelles il pensait qu’on lui accordait sûreté pour sa personne, on ne devrait pas non plus attenter à sa vie, et il faudrait encore seulement le faire reconduire à la frontière, dans des lieux où il n’aurait rien à craindre.

Un Musulman peut garantir la vie à dix ou même selon l’opinion de quelques docteurs à cent Infidèles, lorsque ceux-ci réduits à l’extrémité implorent sa miséricorde ; mais il ne le peut, à l’universalité des habitans d’un pays, d’une ville ou d’un bourg d’une certaine importance. Le Prince seul a ce droit et si l’on est curieux de connaître la formule des lettres de sûreté accordées en pareille occasion, on peut voir dans l’ouvrage de Elmacin la lettre qu’écrivit Omar fils de El-Khattab aux habitans de Jérusalem après la prise de cette ville, la seizième année de l’hégire, et par laquelle ce khalife leur accorda sûreté et protection, pour eux, pour leurs enfans, pour leurs femmes, pour leurs biens et pour leurs temples. De pareilles lettres s’appellent Amân et au Prince seul appartient le pouvoir de garantir ainsi la vie aux Infidèles lorsqu’ils sont déjà sous la puissance des Musulmans.

Quant à la sûreté garantie par les particuliers, il n’importe que cette faveur soit accordée, ou sur le champ de bataille, ou dans la poursuite, ou dans quelque forteresse, pourvu que celui qui en est l’objet ne soit pas déjà au pouvoir des Musulmans. Les esclaves musulmans tombés entre les mains des Infidèles peuvent garantir aussi la vie à ceux-ci, s’ils agissent librement et sans contrainte ; il en est de même des marchands qui voyagent pour leur commerce dans les pays étrangers et des mercenaires dont les Infidèles louent les services à prix d’argent, pourvu que la garante soit donnée sur les terres des Infidèles.

Dès qu’un Musulman a accordé sûreté à un Infidèle, il est tenu de le protéger et d’acquitter sa promesse, à moins que la garantie ne contienne des conditions contraires à la loi divine, c’est-à-dire, au Koran.

Si un Infidèle vient sur le territoire musulman, par exemple, pour faire le commerce, il n’est en sûreté qu’après qu’il lui a été accordé garantie pour sa vie, et il n’est pas permis d’étendre cette garantie au-delà de quatre mois. Si quelqu’un la donnait pour un plus long espace de tems, ce serait nul. Remarquons qu’il n’est pas nécessaire que les Musulmans retirent un grand avantage de pareilles concessions,