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CHAPITRE DEUXIÈME

Cette vie facile et aimable contrastait avec la gravité des événements qui se préparaient.

Dès 1850, le Prince Président, désireux de s’attacher le parti dont MM. de Montalembert et de Falloux étaient les chefs à l’Assemblée nationale, avait soulevé, en opposition avec la Russie, la question assez oubliée des Lieux Saints. Par des capitulations conclues entre la France et la Turquie, les religieux latins devaient conserver en Terre Sainte les lieux de pèlerinage qu’ils possédaient depuis un temps immémorial. Par suite des empiétements des Grecs et des Arméniens soutenus par la Russie, ils avaient perdu neuf sanctuaires sur dix-neuf. À plusieurs reprises la France avait tenté de résoudre la question par voie de conciliation. Des démarches récentes avaient été faites vis-à-vis du Tzar pour régler d’accord avec lui ce différend ; elles n’avaient pas abouti.

Nicolas Ier, confiant dans la suprême influence dont il jouissait en Europe[1], jugeait le moment favorable pour atteindre son but. Il est permis de penser que le Prince Président ne soupçonnait pas toutes les conséquences possibles de ce désaccord.

En 1851, M. Thouvenel, un de ses futurs ministres,

  1. Nicolas Ier et Napoléon III, par Thouvenel.