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CHAPITRE DOUZIÈME

le silence, et elle le fit si bien que M. de Villamarina ne se douta de rien.

Victor-Emmanuel, assiégé chaque jour par le comte de Cavour, persuadé que le salut du pays réclamait ce sacrifice et qu’il s’assurerait ainsi l’appui de la France, autorisa son ministre à en parler à la princesse en sa présence. Il ne voulait pas le faire lui-même, craignant de trahir son émotion par le tremblement de sa voix. Ce fut donc le comte de Cavour qui se chargea de cette mission. Il fit valoir auprès de la princesse que l’Italie lui devrait sa délivrance. À ces mots, elle se borna à répondre : « Puisque mon père me propose cette alliance, elle ne peut être que convenable et heureuse pour mon avenir. Je me soumets donc aveuglément et avec pleine confiance à la volonté du Roi. » Mais en le regardant, elle vit des larmes dans ses yeux. Elle se jeta à son cou en disant « Que me proposez-vous ? Serai-je donc malheureuse ? » Le Roi et surtout M. de Cavour s’efforcèrent de la tranquilliser, lui faisant voir ce mariage sous les plus brillants aspects. Victor-Emmanuel lui dit cependant que le prince n’était pas d’une grande beauté, pour la préparer à une première entrevue. Elle ne fit aucune observation, mais cela servit à amortir sa première impression quand elle vit son fiancé pour la première fois.