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CHAPITRE ONZIÈME

L’impression sinistre causée par ces événements ne devait pas tarder à s’effacer. La reine d’Oude étant morte à Paris, l’Impératrice témoigna le désir de voir son fils et les Indiens de sa suite. L’Empereur prit part à une petite comédie qui fut jouée à cette occasion dans le cercle le plus intime de la cour des Tuileries. MM. Lecocq, de Vareigne, de Latour-Maubourg et de Bourgoing, avec quelques dames du palais, notamment Mmes de Sancy et de Bourgoing, s’habillèrent en Indiens et vinrent un soir dans ce costume complimenter l’Impératrice. Celle-ci ne se doutait de rien ; elle prit la chose très sérieusement et elle se plaça près du prince de Danemark, de passage à Paris, pour recevoir majestueusement le prétendu prince indien. C’était M. Lecocq qui jouait ce personnage : il s’était peint de la tête aux pieds et était méconnaissable. Il fit en anglais un petit discours auquel l’Impératrice répondit ; pendant ce temps les dames voilées se prosternaient la face contre terre. Quel ne fut pas l’étonnement de l’Impératrice lorsqu’elle entendit l’Empereur partir d’un grand éclat de rire : « Ne voyez-vous pas, dit-il, que c’est une plaisanterie ? Ne reconnaissez-vous pas ces messieurs et ces dames ? » L’Impératrice se joignit en apparence à la joie générale ; au fond elle était un peu piquée d’avoir été ainsi trompée.