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CHAPITRE NEUVIÈME

nies d’affaiblissement ne semblent pas au gouvernement une garantie suffisante de la docilité et de la complaisance du Sénat, il fait une fournée de sénateurs. Cela a lieu infailliblement toutes les fois qu’il s’agit de faire passer une loi qu’on sait d’avance devoir rencontrer une opposition sérieuse. Par ces fournées le ministère obtient le double but qu’il a en vue, c’est-à-dire de se rendre le maître des délibérations de la haute Chambre et de la placer dans une position secondaire par rapport à la Chambre des députés. Quant à celle-ci, pour comprendre comment il se fait que depuis la proclamation du statuto l’élément révolutionnaire s’y est toujours trouvé en majorité, il suffit de jeter les yeux sur la loi électorale piémontaise. Cette loi a été faite sur le modèle de celle qui existait en France avant la révolution de 1848. Elle en a reproduit tous les défauts. En créant des chefs-lieux électoraux en nombre égal à celui des députés, elle a favorisé les électeurs des villes au détriment de ceux des campagnes et laisse ainsi les élections à la merci des meneurs toujours plus nombreux dans les grands centres de population. En effet, dans les provinces, la plupart des électeurs, obligés de faire plusieurs lieues pour pouvoir user de leur droit, préfèrent s’en abstenir, retenus qu’ils sont par leurs affaires, par la crainte de la dépense