Page:Reiset - Mes souvenirs, tome 2.djvu/259

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
249
CHAPITRE HUITIÈME

Le dimanche 26 mars je dînai aux Tuileries ; c’était un dîner de trente couverts, fort beau et fort bien servi. Avant de se rendre à table, l’Empereur fit le tour du salon, adressant à chacun un mot aimable. Il est venu à moi plusieurs fois pendant la soirée, me questionnant de nouveau sur la Russie et me parlant des souvenirs de sa mère. J’étais à table à côté de Mme Ferey, fille du maréchal Bugeaud, récemment nommée dame du palais de l’Impératrice. Elle me dit que sa mère étant sans fortune ne pouvait vivre à Paris, pauvreté bien honorable pour l’illustre maréchal qui avait occupé des situations si élevées. Je dis à Mme Ferey qu’en traversant Lyon, en février 1849, j’avais été invité à déjeuner par le maréchal et que j’avais rencontré à sa table son officier d’ordonnance, le capitaine Fabar, qu’il aimait comme un fils et qui a été malheureusement tué au siège de Rome.

À la réception du Palais-Royal, chez le roi Jérôme, on parlait alors du succès de l’emprunt de deux cent cinquante millions. Je demandai au prince pourquoi l’on n’avait pas gardé pour les nécessités futures de la guerre le surplus de la souscription. « C’est précisément, me répondit le prince, l’observation que j’ai faite aujourd’hui à l’Empereur. — Non, me dit-il, on a trop souvent trompé le peuple,