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MES SOUVENIRS

« À propos, la position de Turin est de plus en plus difficile. N’en pleurez pas trop. »

Le général m’avait annoncé son retour quelques jours auparavant en me faisant part d’un sérieux désagrément qui lui était arrivé : « Remerciez Dolfus, m’écrivait-il de Paris le 1er  novembre, et dites-lui que la non-arrivée de mon grand coupé de ville n’est maintenant que trop expliquée. Je viens d’apprendre que M. Albrech, au lieu de l’expédier par le vapeur de Dunkerque, l’avait fait embarquer au Havre sur un vaisseau à voiles qui a péri. Voilà la seconde fois que les navires à voiles nous portent malheur. »

Le 18, j’assistai avec mon excellent chef à un grand dîner officiel chez le comte de Nesselrode, chancelier de l’empire russe. Les salons, dont les murs étaient couverts de tableaux anciens de l’école italienne, étaient fort beaux, le dîner excellent et admirablement servi. Six maîtres d’hôtel portant l’habit marron à la française à boutons d’acier, avec des gilets de soie blanche et de grands jabots, l’épée au côté, dirigeaient les services des domestiques en livrée rouge. Dans le grand salon rouge, en face de la fenêtre du milieu, se trouvait un grand vase de porcelaine de Berlin donné par le roi de Prusse au comte de Nesselrode. Le chancelier était un homme âgé, de