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CHAPITRE QUINZIÈME

Quelques jours après, — le 3 mars 1851, — le duc de Gênes donna son dernier grand bal de l’hiver. On y remarquait M. Musurus, envoyé extraordinaire de la Porte Ottomane, arrivé à Turin quelques jours auparavant pour complimenter le roi de Sardaigne de son avènement et lui apporter de la part du Sultan quelques cadeaux. Le roi et la reine assistaient à cette fête. J’eus l’honneur de danser avec la duchesse de Gênes. Elle me dit pendant la contredanse : « Dieu sait si nous danserons l’année prochaine et ce qui nous arrivera d’ici là. » Nous parlâmes chevaux. Elle me dit qu’elle ne montait à cheval que depuis son mariage, mais il parait qu’elle avait pris goût à cet exercice, car je la rencontrais fort souvent en amazone sur la route de Montcalieri, résidence habituelle de la cour depuis l’avènement de Victor-Emmanuel.

Silvio Pellico habitait alors Turin ; c’était un homme fluet, maigre, maladif, je le voyais souvent. J’eus plusieurs fois l’occasion de conduire chez lui des visiteurs qu’attiraient sa réputation et le bruit fait autour de son nom. Je lui présentai notamment M. Ampère, membre de l’Académie française, et mon ami Artus de Brissac, attaché à la Légation. Plus tard MM. de Falloux, de Billing et de nombreux Français de distinction me prièrent de les conduire chez lui.

M. His de Butenval m’ayant demandé de lui pro-