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CHAPITRE ONZIÈME

de beaucoup de dignité comme ministre des affaires étrangères. Il était universellement respecté et aimé ;

« Je suis gravement blessé, me dit-il, mais je me suis bien battu. Dites-le en France, mon cher Reiset ; dites à mes amis que je meurs en soldat. » Il me montra sa blessure et m’entretint quelques instants du prince Eugène de Carignan. Je pris congé de lui pour ne pas le fatiguer : je ne devais plus le revoir. Plus tard, sa femme me chargea de faire faire son portrait d’après un daguerréotype ; je confiai ce soin à M. Gonin, artiste piémontais.

Le soir même de notre arrivée, nous nous rendîmes chez le docteur Pagani où avait été transporté mon brave ami Charles de Robilant. Avec quelle émotion la comtesse, comprimant les battements de son cœur, entra dans la chambre de son fils et s’approcha de son lit ! Il avait été la veille amputé d’une main. Scarampi la suivit et peu après j’entrai moi-même. Je revis avec bonheur Charles qui du moins avait la vie sauve, ayant échappé aux plus grands dangers. Son cheval avait été tué sous lui par le boulet qui lui avait broyé la main.

L’opération faite par le chirurgien Arena avait réussi, mais l’anxiété restait grande ; les suites de cette blessure pouvant être très gravés dans une ville devenue malsaine par l’encombrement des blessés.