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MES SOUVENIRS

tiendra de l’Autriche des conditions de paix qu’elle refuserait sans doute en traitant avec moi. »

« Les témoins de cette scène si solennelle fondaient en larmes ; aucune émotion ne se manifesta sur la figure de Charles-Albert. Toutes les instances du duc de Savoie pour ébranler sa résolution forent inutiles. Le roi l’embrassa ainsi que le duc de Gênes, et les autres témoins de son abdication forent remerciés d’une manière touchante des services qu’ils lui avaient rendus. Il leur dit :

« Messieurs, je ne suis plus votre roi ; comme vous me l’avez été, soyez fidèles et dévoués à mon fils… » Puis, il se retira pour écrire à la reine et il chargea le duc de Savoie de lui remettre lui-même cette lettre d’adieu.

« Dans ce moment d’indescriptible émotion on oublia la plus importante formalité, l’acte formel d’abdication ne fut point dressé ; le ministre Cadorna, représentant du cabinet au quartier général, au spectacle de cette grande infortune, omit la constatation légale de la résolution de Charles-Albert.

« Vers dix heures le chevalier de Robilant, aide de camp du roi, entra dans sa chambre ; il faisait partie de sa maison depuis trente-quatre ans. Son neveu Charles de Robilant venait d’avoir la main