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CHAPITRE NEUVIÈME

les eût réalisées au grand bénéfice de notre pays s’il avait vécu. En trois ans il aurait régénéré l’État romain : lui seul pouvait mener à bien l’entreprise de l’union de l’Italie. J’en étais si sûr que j’ai voulu le faire venir ici, sachant que le Piémont pouvait seul lui donner la force nécessaire pour réaliser ses projets : partout ailleurs cette force devait lui manquer. Je sais du reste qu’il a toujours résisté à Guerrazzi et qu’il lui a donné les meilleurs conseils pour l’organisation de l’Italie. Aujourd’hui on ne sait que faire à Rome et tant que le Pape n’y reviendra pas les affaires de l’Italie seront en souffrance. Mamiani n’est pas un homme pratique et il est menacé par le prince de Canino et Sterbini, qui sont aussi malhonnêtes qu’incapables. Si Mamiani leur cède, notre politique sera fort compromise ici, car le mouvement qui le renversera et qui établira la République à Rome fera le tour de l’Italie, comme celui qui a mis Guerrazzi et Mamiani au pouvoir, et nous nous trouverons en butte à ce mouvement, qui nous renversera à notre tour. Je resterai à mon poste tant que je le pourrai. Je n’ai pris le pouvoir que pour préserver la maison de Savoie du danger qui la menace. Elle n’avait d’autre parti à prendre que la réaction ou la guerre, et la réaction même ne l’eût pas sauvée parce que le mouvement eût été plus fort qu’elle dans