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CHAPITRE HUITIÈME

écrivait-il à un ami, j’étais venu à Turin, appelé par le roi pour former le cabinet ; je suis venu, mais pour décliner cet honneur. Je n’aurais pas voulu faire la guerre à l’Autriche et encore moins faire la paix et la signer. Outre cela, l’opposition, ayant les perturbateurs de Gênes à ses gages, aurait rendu tout ministère impossible, le sien excepté. Il faut que les exaltés fassent leur temps ; il faut que le pays les voie à la besogne, les connaisse et s’en lasse. C’est ce qui commence à arriver. Les ministères démocratiques de Rome, Florence et Turin sont l’expression et l’ouvrage de la jeune Italie. C’est un fait connu de tout le monde, excepté de l’abbé Gioberti qui croit mener et qui est mené. Les républicains ont réussi, en flattant sa vanité, à s’en faire un instrument et à se couvrir de son nom et de sa réputation. Mais comme, d’un côté, l’inexpérience et l’incapacité politiques de Gioberti sont immenses et que, de l’autre, l’absurdité des théories de la jeune Italie saute aux yeux de tout le monde une fois qu’on veut les traduire en pratique, il en résulte que le ministère actuel (celui que présidait Gioberti, à défaut de Massimo d’Azeglio) a très peu de chance de pouvoir se soutenir longtemps, même avec une Chambre de sa couleur ; car l’Europe et les faits sont là pour leur donner de fameux démenti ».