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CHAPITRE HUITIÈME

comme moyen, on l’admire comme principe lorsqu’il sert la cause pour laquelle on se passionne. Ceux qui admettaient que Rossi était un traître trouvaient tout naturel qu’on s’en débarrassât par l’assassinat. Les plus modérés ne disaient rien, les autres applaudissaient, fêtaient l’assassinat, et son exemple était devenu un type à l’usage de tous les fanatiques et une menace usuelle contre tous les ministres. Le farà come a Rossi devint une expression stéréotypée dans la bouche et dans les écrits de tous les exaltés.

À Livourne et ailleurs, les chants et les cris qui avaient béni la main de l’assassin trouvèrent de l’écho. À Turin même où le caractère national a plus de générosité et de courage, il y eut des apologies publiques de l’assassinat et des encouragements à suivre l’exemple des Romains. Une troupe de deux cents personnes, composée surtout de réfugiés lombards et modenais, se porta tumultueusement sous les fenêtres du ministère. Le général Perrone descendit dans la rue et se mêla aux groupes sans être reconnu pour juger par lui-même du caractère de l’attroupement. Il entendit les cris de : « Mort au ministère rétrograde ! Vive la lanterne ! Vive le meurtrier de Rossi ! À bas la France et l’Angleterre ! La guerre ! La guerre ! »