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MES SOUVENIRS

zelli des gardes fut tué sur place. Le roi cherchait visiblement la mort. Un violent orage éclatait sur Milan. Le tonnerre et les éclairs, s’unissant au bruit du canon, ajoutaient à l’horreur du spectacle.

C’est alors que le duc de Dino, avec lequel j’étais lié, qui servait comme volontaire dans l’armée sarde, s’approcha de Charles-Albert et lui dit que j’avais manifesté l’intention de me rendre au camp autrichien dans le cas où les progrès de l’ennemi pourraient faire craindre un bombardement, afin d’obtenir du maréchal Radetzki une suspension d’armes de quelques heures pour faire sortir de la ville mes compatriotes. Le roi me fit appeler. Je m’approchai de lui, le chapeau à la main, et je lui exprimai le désir d’aller au camp autrichien. Charles-Albert me fit l’accueil le plus gracieux, et quelques boulets ayant sifflé en cet instant au-dessus de nous, il me dit avec affabilité en me tendant la main[1] : « J’aime à voir les Français au feu ; ils y font toujours bonne figure. »

Il me fit remarquer que les Autrichiens tiraient trop haut. Cependant au même instant un boulet atteignit à côté de nous le cheval du colonel Brianski, dont le sang m’éclaboussa. J’étais à pied à côté du

  1. Ce qu’il ne faisait pas souvent, et ce qui était chez lui une marque de distinction et de réelle sympathie.