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MES SOUVENIRS

ne voulut pas le rendre, car c’est un beau trophée pour lui. Un croate tira un coup de fusil à La Valle à quatre pas de distance et le manqua ; celui-ci s’en aperçut, s’élança sur lui et d’un coup de sabre le fendit jusqu’aux épaules.

La nuit qui suivit la bataille, on garda les prisonniers dans une église et leur colonel, aussi prisonnier, engagea sa parole que pas un ne chercherait à s’évader. Dans la nuit un soldat ayant tenté de le faire, il demanda et obtint des fusils et le fit fusiller sur-le-champ, en disant que les Piémontais traitaient avec trop de loyauté pour qu’il fût permis d’en manquer avec eux. Ce même colonel, parlant le lendemain avec les nôtres, leur dit qu’il avait fait les campagnes de Napoléon, qu’il avait vu les Autrichiens, Russes, Français, et Anglais, mais que les Piémontais ne le cédaient à aucune autre troupe, et il ajouta que ce qu’il admirait par-dessus tout chez nous était l’artillerie !!!

Racontez les faits ci-dessus à tous ceux qui voudront les entendre, car il n’y a pas de mal qu’on sache à Turin qu’à l’armée on ne se gratte pas seulement les coudes, comme beaucoup de gens le croient.

Adieu, chère maman.