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malentendu ne provenait que d’une méprise de la part du savant anglais. Ce qui est vrai, c’est que les écrivains latins n’adoptèrent pas cette dénomination, et que Denys le Périégète, qui florissait vers la fin du premier siècle, paraît ne pas la connaître.

Après la mort d’Alexandre le Grand, pendant les guerres qui s’élevèrent entre ses lieutenants, les colonies laissées par Alexandre dans la vallée de l’Indus et les garnisons qui occupaient les positions fortifiées se trouvèrent dans un grand embarras ; la plupart abandonnèrent les lieux qui leur avaient été assignés pour demeure et se rapprochèrent de l’Euphrate. Vers l’an 250 avant J. C. Asoka, qui avait hérité d’un empire puissant sur les bords du Gange, et qui joignait la prudence à l’audace, profita des circonstances pour ajouter la vallée de l’Indus à ses vastes domaines. Mais bientôt les généraux grecs qui avaient levé l’étendard de l’indépendance dans la Bactriane franchirent l’Hindoukousch, et firent reconnaître leur autorité dans toute la vallée de l’Indus ; leur domination s’étendit jusqu’au Gange à l’est, et jusqu’au golfe de Cambaye au sud-est[1].

L’autorité dés rois grecs de la Bactriane se maintint pendant plus d’un siècle. On sait d’une manière générale que leur domination ne fut pas sans gloire. On sait, de plus, que, tout en faisant respecter le nom grec, ainsi que le prouvent leurs médailles, ils firent des concessions aux préjugés des indigènes. Par exemple, je suis porté à croire que le roi Ménandre, dont l’auteur du Périple trouva les belles monnaies encore en circulation dans les villes de commerce de l’Inde[2], avait embrassé le bouddhisme. En effet, Plutarque dit que ce prince s’était

  1. Strabon, liv. XI, chap. XI (p. 442 de l’édition Didot).
  2. P. 293 du texte grec.