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dirigé contre les amis du brahmanisme. M. Stanislas Julien n’a pas pu faire autrement que de reproduire Ki-li-to par le sanscrit Kritya ; mais le mot Kritya est inconnu d’ailleurs, et l’acception qu’il représente ne Rappliquant à aucune époque déterminée, on peut dire qu’elle est comme non avenue. En faisant subir un léger changement au son chinois, et en suppléant une n, l’on obtient Gonarda, au lieu de Kritya, et l'on restitue un témoignage très-important à l’histoire[1].

La méthode que je suis n’est pas nouvelle : c’est celle que j’ai employée, il y a dix-huit ans, dans mon Mémoire sur l’Inde, et grâce à laquelle j’ai mis en lumière tant de faits entièrement nouveaux.

Mais le navire nous rappelle. Il met à la voile pour les bouches de l’Indus, et nous allons passer quelques jours à Bahman-abad, ou plutôt, pour reproduire l’expression du Périple, à Minnagara. L’auteur dit que, comme le fleuve, à cette hauteur, n’avait pas assez de profondeur, les navires s’arrêtaient dans un port situé près de son embouchure, et que les marchandises étaient transportées sur des alléges à Minnagara[2]. Ptolémée avait donné à la vallée de l’Indus le nom d’Indo-Scythie, et l’auteur du Périple a fait usage de cette dénomination ; mais il ajoute que le pays était alors au pouvoir de chefs de race parthe, sans cesse en guerre les uns avec les autres[3].

D’où vient le nom d’Indo-Scythie ? Le docteur Vincent, étonné d’une dénomination aussi étrange, appliquée à un pareil pays, avait cru y voir l’effet d’un malentendu[4] ; mais le

  1. Sur le changement que je propose, voyez la Méthode de M. Julien, p. 10.
  2. Pottinger et Alexandre Burnes parlent, pour les temps actuels, de bateaux à fond plat construits pour la même destination. (Burnes, t. I, p 194 et 212 ; Pottinger, t. II, p. 215.)
  3. P. 286 du Périple.
  4. Relation de Néarque, traduction française, p. 159 de l’édition in-4o.