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ce mot a cessé d’être courant, ne sont pas en état de remonter à son origine. C’est ce qui fait que les auteurs de leurs annales, lorsqu’ils veulent rapprocher des faits arrivés à des époques différentes, commettent quelquefois les erreurs les plus singulières. À la fin du XIIIe siècle, les Mongols, s’étant rendus maîtres de la Chine, essayèrent d’établir une écriture alphabétique où chaque son était représenté par une seule lettre, et où les principaux sons, articulations et voyelles, avaient leur place réservée. C’est ce qu’on appela l’écriture passépa, du nom de l’inventeur. On eut soin de faire imprimer certains livres classiques de la Chine avec les nouveaux caractères, et ordre fut donné dans les écoles d’apprendre à lire aux enfants dans les nouvelles éditions. Mais tel est le respect superstitieux des Chinois pour leurs anciens usages, qu’après la chute de la domination mongole la nouvelle écriture fut abandonnée. Les Mandchous, aujourd’hui maîtres de la Chine, possèdent depuis longtemps une écriture alphabétique ; mais ils n’ont pas osé l’imposer aux Chinois[1].

On sait que le bouddhisme, qui prit naissance dans l’Inde quelques siècles avant notre ère, a fait de grands progrès en Chine, et que les traités fondamentaux de la religion bouddhique ont été traduits de bonne heure en chinois. Ordinairement les termes sacramentaux sanscrits, au lieu d’être traduits en chinois, ont été simplement transcrits dans les caractères de cette langue. Malheureusement l’on ne s’est pas toujours accordé dans la manière de transcrire ; et d’ailleurs la plupart de ces transcriptions ne donnaient pas l’idée de l’original. Pour se mettre à la portée des personnes qui aiment à se rendre compte des choses, les docteurs bouddhistes chinois ont composé des vocabulaires sanscrits-chinois, où les formes

  1. Sur l’écriture passépa, voyez deux Mémoires de M. Pauthier, dans le Journal asiatique d’avril 1860, p. 321, et de janvier 1862, p. 5.