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à Nouschirvan l’Oman et les régions de l’Arabie au midi du golfe Persique, dont ses généraux s’étaient emparés. » Saint-Martin a été induit en erreur par un passage de l’Histoire universelle de Mirkhond, que l’illustre Silvestre de Sacy n’avait pas traduit avec sa précision ordinaire. Mirkhond raconte que, Nouschirvan ayant fait marcher une armée contre le roi de l’Inde, le prince indien lui envoya des députés chargés de présents, et que, pour obtenir la paix, il abandonna les pays situés sur les côtes de l’Oman, lesquelles touchaient aux frontières de la Perse[1], c’est-à-dire le Béloutchistan actuel[2].

On aura moins de peine à comprendre l’influence exercée par l’Inde sur les provinces orientales de la Perse, quand on connaîtra l’état des croyances dans ces contrées. Lorsque Darius, fils d’Hystaspe, fit la conquête de ces provinces, le culte des habitants se partageait probablement entre les doctrines de Zoroastre et les doctrines brahmaniques, qui alors n’étaient pas aussi tranchées qu’elles le furent plus tard. Sous le règne d’Asoka, vers l’an 240 avant J. C, le bouddhisme fut apporté dans le pays par un docteur de la ville de Mathoura nommé Upagoupta[3], et y fit de grands progrès. Vinrent ensuite les doctrines indiennes sivaïtes. Si l’on joint à cela le culte du

  1. [Texte arabe] (P. 245du texte imprimé.) À la page 372 de la traduction de Silvestre de Sacy, où se retrouve ce passage, il y a quelques expressions qui seraient susceptibles de changement ou, du moins, d’explication. Ligne 14, au lieu de Khorassan, il faut lire Khorzan, et voir là le passage du Caucase entre la mer Noire et la mer Caspienne (Strabon, p. 452 et 453 de l’édition Didot) ; ligne 16, au lieu de la péninsule d’Oman, il faut lire le Djeziré (la Mésopotamie) et l’Oman ; ligne 17, l’expression frontière du Magreb peut s’expliquer ainsi : Nouschirvan, s’étant rendu maître de l’Arabie Heureuse et des côtes de la mer Rouge, inquiétait la côte égyptienne et par là même la frontière du Magreb, c’est-à-dire de l’Afrique.
  2. Sur cet emploi du terme Oman, voyez ci-devant, p. 20.
  3. Comparez l’Introduct. à Vhist. du bouddhisme, par M. Burnouf, p. 133, 221, 424 et suiv. et la Relation des voyages de Hiouenthsang, traduction de M. Stanislas Julien, t. I, p. 418, et t. II, p. 171.