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maient un État puissant[1]. Quelques-uns de ses princes avaient embrassé le judaïsme ; dans tous les cas, les Juifs étaient très-nombreux dans le pays. Parmi les inscriptions, il y en a une qui porte la date 573, et une autre la date 640. Ces dates sont restées une énigme pour les savants qui ont publié ces inscriptions. Les faits. rapportés dans ce mémoire et la présence des Juifs dans le pays prouvent qu’il ne peut s agir ici que de l’ère des Séleucides, adoptée par toutes les communautés juives sous le nom d'ère des contrats. D’après cela, le nombre 573 nous donne l'an 261 de J. C. et le nombre 640, l’année 328, ce qui rentre dans les limites établies pour la date de la composition du Périple.

Parmi les villes que Charibael possédait sur la côte méridionale de l’Arabie, le Périple en cite une qu’on appelait Arabia Felix[2]. Située près de l’entrée du golfe Arabique, elle répond nécessairement à la ville appelée de tout temps par les indigènes Aden[3], terme sémitique que nous prononçons Éden, et qui a servi à désigner le paradis terrestre. Le fait est qu'Aden, par sa situation et la force de son assiette, a toujours été une position considérable. Or l’auteur du Périple dit qu'avant la découverte de la mousson, c’est à Arabia Felix que se rendaient les navires arabes, indiens, malais, chargés des riches produits de l’Asie orientale, et que c’est là que les navires égyptiens venaient s’approvisionner. Quand les navires partis d’Égypte eurent pris l’habitude[4] de se rendre directement sur la côte occidentale de la presqu’île de l’Inde, l’im-

  1. Voyez le mémoire sur la Mésène.
  2. Εύδαίμων Άραϐία, p. 276 et 277 du texte imprimé.
  3. עדן.
  4. Agatharchide, qui florissait avant la découverte de la mousson, parle des navires des côtes de l’Arabie, de la Perside et de la Carmanie, qui se rendaient vers les bouches de l’Indus (Petits Géographes grecs, édition Didot, t. I, p. 191), et il ne paraît pas qu’à cette époque les navires égyptiens fissent de même.