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ils reflètent un travail légendaire et explicatif qui, pendant quarante ans au moins, s’était fait au sein des communautés. Jean n’ayant pas de valeur historique et Luc étant un ouvrage de troisième main, restent les sources de Marc et de Matthieu, en particulier Q et le fond de Marc. Ce qu’il peut y avoir de solide dans ces écrits dérive donc de deux sources perdues dont rien ne nous garantit l’autorité. Il est même certain que le fond de Marc ne peut pas remonter à Pierre, témoin oculaire, car ce qui concerne Pierre dans Marc est vague ou hostile. Quant aux discours de Q, il est évident que personne ne les avait recueillis par écrit sur le moment : en mettant les choses au mieux, on n’y peut voir que l’écho des paroles que les disciples du Seigneur rapportaient longtemps après sa mort et que des hommes plus habiles, influencés par la. prédication de saint Paul, ont arrangées, complétées et mises par écrit. Parler de l’authenticité du Sermon sur la Montagne (où la Montagne elle-même n’est qu’une fiction, destinée à donner un pendant au Sinaï) n’est pas le fait d’un esprit initié aux procédés de la critique. Bien plus : il y a des paroles comme celles que Jésus prononce pendant le sommeil des apôtres (Mt., 26, 39 ; Mc., 14, 35 ; Lc., 22, 41),dont on peut affirmer qu’elles n’ont été recueillies ni entendues par personne. « S’il n’y avait pas l’autorité de l’Eglise, écrivait saint Augustin, je ne croirais pas à l’Évangile. [1] La

  1. Saint Augustin, Contre l’épître intitulée « du Fondement », 5 (éd. Vivès, t. XXV, p. 435) : « Ego vero Evangelio non crederem, nisi me catholicae ecclesiae commoveret auctoritas... Ego me ad eos teneam quibus praecipientibus Evangelio credidi. »