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histoire de la révolution russe

grâce à l’intelligence du général Polivanov, un changement commença. Les zemstvos, indépendants de la bureaucratie, intervinrent ; la production intérieure fut doublée, puis décuplée ; la crise était presque surmontée au mois d’octobre. Par Arkangel et Vladivostok, la Russie recevait d’énormes cargaisons, provenant d’Angleterre, des États-Unis, du Japon. Mais beaucoup de ces envois s’égaraient, disait-on, sur des voies latérales, où ils étaient abandonnés on ne savait par quels ordres ; d’autres ne répondaient pas aux besoins prévus ; d’autres, enfin, arrivaient trop tard et étaient mal répartis. Tout habitués qu’ils sont à l’incurie des bureaucrates, les Russes soupçonnaient, dans ces contretemps répétés, l’effet de mauvaises volontés actives en haut lieu. L’arrêt de plusieurs offensives, qui s’annonçaient heureuses, fut attribué à ce « sabotage » des transports.


XXIII


À la colère grandissante de l’opinion, le Gouvernement ne répondit d’abord que par la politique des pogroms, qu’il avait déjà adoptée comme dérivatif en 1905. Il y avait des millions de juifs en Russie et en Pologne : c’est à eux qu’étaient dus les trahisons, le défaut d’organisation, la hausse des prix. Il s’agissait de détourner l’irritation populaire sur ces malheureux sans défense, dont quatre cent mille servaient dans les armées russes sans l’espoir d’y conquérir un grade. La police aux armées s’y employa comme la police à l’arrière ; elle