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aussitôt en conséquence. La preuve était faite ; Miassoyedov fut arrêté.

Ce qu’il y a d’extraordinaire, c’est que, dès 1912, Miassoyedov était suspect de traîtrise ; l’écho de cette accusation parvint à un journal paraissant à Londres, qui s’occupait, à titre exclusif, des affaires de Russie. Voici le texte[1] :


Après la mort de Stolypine (qui l’avait privé de son emploi de chef de la gendarmerie à Wirballen), Miassoyedov réussit à obtenir une place au ministère de la Guerre, où il recevait des ordres secrets ; suivant toute apparence, sa fonction principale consistait à contrôler les sentiments politiques des officiers. M. Soukhomlinov était content de lui ; de capitaine, il le fit nommer lieutenant-colonel. Mais les principaux officiers de l’État-major lui témoignaient une méfiance insurmontable. On lui refusait l’accès des documents secrets, ainsi que la clef du code secret officiel. À en croire une opinion répandue parmi les officiers, Miassoyedov était un espion autrichien. L’affaire finit par être ébruitée dans la presse. Un journal du soir, Vetchernoié Vremia, commença une campagne à ce sujet ; mais, sauf l’assertion que Miassoyedov avait désorganisé le système de contre-espionnage, aucune accusation précise ne put être formulée contre lui.


La Russie possédait de grands établissements industriels, comme ceux de Poutilov, et son sol lui fournissait en abondance les matières premières ; pourtant, on estimait qu’elle était incapable d’armer et d’équiper ses immenses réserves. Jusqu’en août 1915, jusqu’au désastre, aucune tentative n’avait été faite pour organiser l’industrie en vue de la guerre ; tout se traitait, comme par le passé, entre le ministre et ses fournisseurs habituels — au prix de quels abus, on l’a dit à la Douma. À ce moment, sous la pression de la nécessité et

  1. Darkest Russia, 8 mai 1912, p. 4.