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histoire de la révolution russe

sans que la police y mît obstacle, une réunion privée des délégués des zemstvos et des municipalités eut lieu à Pétersbourg, à la suite de quoi il fut décidé qu’on demanderait à la Couronne l’institution d’une représentation nationale, l’égalité des citoyens devant la loi et des garanties de la liberté individuelle. Ces vœux furent portés à la connaissance du prince Mirsky, qui était disposé à les accueillir. Mais l’empereur, sous l’influence du grand-duc Serge et surtout du procurateur du Saint-Synode, le fanatique Pobedonoszev, se contenta de promulguer un ukase (25 décembre 1904) où, tout en annonçant quelques réformes pour satisfaire les ouvriers et les paysans, il ne dit pas un mot d’un régime constitutionnel.

L’agitation, stimulée par cette déception, ne fit que grandir. Les zemstvos de Moscou et de Tchernigov s’ajournèrent sine die, en déclarant que le manifeste du tsar ne répondait pas aux vœux de la nation (30 décembre). Quelques jours après (2 janvier 1905), la Russie apprit avec consternation la prise de Port-Arthur, Le prince Troubetskoï, président du zemstvo de Moscou, adressa une lettre ouverte au ministre de l’Intérieur, déclarant que la Russie était à la veille d’une révolution si l’on continuait à lui refuser toute liberté, Mirsky, qui n’était pas partisan de la résistance à outrance, donna sa démission et fut remplacé par un inconnu, Bouliguine.

Une grève formidable de cent mille ouvriers, organisée par l’Union des Unions (analogue à la C. G. T. française), s’était déclarée le 16 janvier à Pétersbourg, notamment aux usines Poutilov. Le 21, un groupe de grévistes, conduit par le prêtre démocrate Gapone (probablement affilié à la police),