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DIDEROT.


petit insecte très industrieux ; il creuse dans la terre un trou en forme d’entonnoir, il le couvre à la surface avec un sable fin et léger, il y attire les insectes étourdis, il les prend, il les suce, puis il leur dit : « Monsieur Diderot, j’ai l’honneur de vous souhaiter « le bonjour. » Il est entouré de formica-leo qu’il appelle ses amis, et, pour s’excuser, se vante à Sophie de ne lire, de ne réfléchir, de ne méditer, de ne regarder, de n’entendre et de ne sentir que pour eux. Enchanté de retrouver ses idées dans le livre d’un confrère, il appelle ce mouvement de satisfaction « ses droits d’auteur ». Il a refait et transformé les dialogues de Galiani sur le commerce des blés. Il a alimenté, avant de les réfuter, les chapitres les plus hardis d’Helvétius. Les éclairs qui illuminent l’histoire philosophique de Raynal sortent de sa forge. Il a donné à Rousseau le paradoxe qui a fait le succès du fameux discours « Si le rétablissement des sciences et des arts a contribué à épurer ou à corrompre les mœurs «. Comme il composait autrefois les devoirs de ses camarades du collège d’Harcourt, il « blanchit » maintenant « le linge » du baron d’Holbach qui écrit en haut allemand et se pique, quand Diderot a refait ses manuscrits, d’écrire comme Voltaire. Il a rempli la Correspondance littéraire de Grimm qui lui « remet son tablier », chaque fois qu’il part en voyage, et oublie de le lui reprendre au retour. Une fois qu’il a passé deux jours et deux nuits à rédiger pour lui le compte rendu d’un Salon : « La seule chose que j’ai à cœur, écrit-il à cet ami