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PHILOSOPHIE.


vrage d’Helvétius intitulé l’Homme et les Pensées sur l’Interprétation de la nature.

D’abord, la méthode ; c’est celle de l’invention scientifique, celle des physiciens. Diderot se représente la vaste enceinte des sciences « comme un grand terrain parsemé de places obscures et de places éclairées ». Il s’agit pour la sagacité qui perfectionne « d’étendre les limites des places éclairées », pour le génie qui crée « de multiplier sur le terrain les centres de lumière ». Mais bien que les faits, quelle qu’en soit la nature, soient la véritable richesse du philosophe, ce qu’on appelle la philosophie rationnelle s’est occupé beaucoup plus à rapprocher et à lire les faits qu’elle possède qu’à en recueillir de nouveaux. D’où cette conséquence qu’il suffit « d’un manœuvre poudreux, qui apporte tôt ou tard, des souterrains où il creuse en aveugle, le morceau fatal à cette architecture élevée à force de tête, pour que tout s’écroule et qu’il ne reste de l’édifice que des matériaux confondus pèle-mêle ». Il faut donc que la nouvelle science, la philosophie expérimentale, « multiplie ses mouvements à l’infini, soit sans cesse en action et mette à chercher des phénomènes tout le temps que la raison emploie à chercher des analogies. Elle ne sait ni ce qui lui viendra, ni ce qui ne lui viendra pas de son travail ; mais elle travaille sans relâche. » Pendant que la philosophie rationnelle, pesant les possibilités, dit hardiment : on ne peut décomposer la lumière, au contraire la philosophie expérimen-