ajoute à sa négation l’ironie et jusqu’à des turlupinades. Seulement, une fois qu’il est arrivé ainsi sur le faîte de l’incrédulité, il aspire à descendre ; serait-il Diderot s’il ne se contredisait pas ?
Le voici donc, en effet, et précisément dans le plus audacieux de ses fragments retrouvés, le Rêve de d’Alembert, qui fait de ce Dieu inutile l’âme possible du monde et l’Éternel Devenir : « Qui est-ce qui vous a dit, demande Bordeu à Mlle de Lespinasse, que ce monde n’a pas aussi ses méninges comme l’homme, et qu’il ne réside pas là un être central qui serait Dieu par sa contiguïté sensible avec tous les êtres et les objets de la nature, qui, par son identité avec eux, saurait tout ce qui s’y passe, et par sa mémoire tout ce qui s’y fait, et ce qui s’y fera aussi, par une suite de conjectures vraisemblables ? » Donc, ce Dieu superflu n’étant cependant pas impossible, il prend ses précautions. Le philosophe, qui entretient la maréchale de Broglie, commence par établir que, si un esprit, qui serait Dieu, fait de la matière, il n’est pas plus difficile de concevoir que la matière fasse de l’esprit. Mais si Dieu existe par hasard ? Oh ! alors il est indulgent, il ne peut pas ne pas l’être, il n’y a que des bêtes féroces qui puissent penser qu’il damnerait Socrate, Phocion, Aristide et Trajan ; saint Paul lui-même n’a-t-il pas professé que chacun sera jugé par la loi qu’il a connue ? est-ce que celui qui fit des sots les punira pour avoir été des sots ? Et là-dessus le conte du jeune Mexicain qui, assis sur une planche au bord de l’Océan,