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PHILOSOPHIE.


bonne autant qu’il est possible à quiconque n’a jamais eu aucun commerce immédiat avec la Divinité ».

Prenez garde pourtant. Dans la même page où il montre comment il faut expliquer aux enfants que Dieu est toujours présent et que, s’il avait un élève à dresser, il l’accoutumerait à dire : « Nous étions quatre, Dieu, mon ami, mon gouverneur et moi » ; dans cette même page ce déiste d’aujourd’hui, théiste d’hier, devient déjà panthéiste : « Les hommes, s’écrie-t-il, ont banni la Divinité d’entre eux, ils l’ont reléguée dans un sanctuaire ; les murs d’un temple bornent sa vue ; elle n’existe point au delà. Insensés que vous êtes ! détruisez ces enceintes qui rétrécissent vos idées ; élargissez Dieu ; voyez-le partout où il est, ou dites qu’il n’est point. »

Il l’élargit si bien, l’étendant sur toute la nature, puis, bientôt, par une invincible conséquence, le confondant avec elle, que, trois ans après, il ne le trouve plus.

À partir de la Lettre sur les aveugles à l’usage de ceux qui voient, suivie, en 1754, des Pensées sur l’interprétation de la nature et, plus tard, en 1769, du Rêve de d’Alembert, Diderot est officiellement, sinon irrévocablement, athée. Selon la définition qu’il avait donnée lui-même, d’après Shaftesbury, il est le parfait athée, c’est-à-dire qu’il « ne reconnaît dans la nature d’autre cause et d’autre principe des êtres que le hasard » ; il nie « qu’une intelligence