Page:Reinach - Cultes, mythes et religions, Tome II, 1909.djvu/234

Cette page n’a pas encore été corrigée

le séjour souterrain du Tartare, frappe la terre avec sa main :

« Χειρὶ ϰαταπρηνεῖ δ’ ἔλασε χτόνα ϰαὶ φάτο μῦθον »

Elle frappe ainsi la terre pour l’appeler, pour se faire écouter d’elle. De même, chez les Zoulous, quand on vient consulter un devin, celui qui l’interroge doit frapper la terre avec les verges pendant qu’il pose la question[1]. Pausanias raconte[2] que, dans le culte de Déméter à Phinée en Arcadie, le prêtre revêtait le masque de la déesse et frappait la terre avec des verges. Il s’agissait là sans doute de réveiller et d’exciter la fertilité du sol ; mais cela implique que l’on réveille d’abord les génies de la terre, que l’on appelle violemment leur attention.

Ainsi Xerxès, de même que Cyrus dans sa campagne contre Babylone, n’a pas agi comme un fou, mais comme un superstitieux. Les Grecs, étant sortis de la phase où se mouvait encore la superstition des Perses, ne comprenaient rien aux rites de leurs ennemis et, en les interprétant d’après les apparences, attribuaient aux Barbares des absurdités qui n’avaient aucun caractère religieux.

Hérodote n’a pas compris davantage, et les Modernes n’ont pas compris non plus, l’acte rituel accompli par Polycrate, tyran de Samos, lorsqu’il jeta son anneau dans la mer. Maître de la plus puissante marine de la Grèce, Polycrate était l’allié du sage roi d’Égypte Amasis. Ce dernier, au rapport d’Hérodote, lui conseilla de craindre la jalousie des dieux et d’en détourner les effets par une perte volontaire[3]. Polycrate résolut de sacrifier un de ses objets les plus précieux, une émeraude montée en or, qui lui servait de cachet ; pour cela, il fit équiper un vaisseau et se fit conduire en pleine mer, d’où il lança son anneau dans les flots, à la vue de tous ceux qu’il avait menés avec lui[4]. On sait comment cet anneau fut avalé par un

  1. Frazer, Pausanias, t. IV, p. 240.
  2. Pausanias, VIII, 15, 2
  3. Hérodote, III, 40.
  4. Hérodote, III, 41.