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LE CHEVAL SAUVAGE.

que ardent du soleil réfléchi par la surface tranquille de l’eau m’éblouissait.

Une nouvelle lueur d’espérance traversa alors mon cerveau. J’étais comme l’homme qui se noie et s’accroche à un fétu de paille. Le monstre était maintenant sur mes talons : l’instant d’après, le combat devait commencer.

— Pas encore, pas encore ! pensai-je. J’aime mieux me battre dans l’eau ; cela me donnera peut-être un avantage ; peut-être pourrai-je me dérober en plongeant.

Je sautai d’un bond, sans prendre le temps de mesurer mon élan, au milieu du lac. Je n’avais de l’eau que jusqu’au genou ; mais, en me déplaçant de quelques pas, j’enfonçai jusqu’à la ceinture.

Alors, le cœur serré, je relevai la tête. Quelle ne fut pas ma joie en constatant que l’ours avait fait halte au bord du lac et ne semblait pas se soucier de me suivre ! Mon étonnement était encore plus grand que ma joie, car je savais que l’eau ne pouvait effrayer le vieil Éphraïm, qui est excellent nageur, et j’en avais vu plus d’un passer des lacs plus profonds que celui-ci et nager dans un fleuve impétueux contre le courant. Qu’était-ce donc qui l’empêchait d’avancer ? Je ne pouvais le deviner ; mais pour plus de sécurité, je m’éloignai davantage jusqu’à ce que ma tête seule dépassât. Pendant ce temps, je ne perdais pas un seul instant de vue mon ennemi. L’ours s’était assis sur ses pattes de derrière et épiait mes mouvements, tout en continuant à avoir l’air de ne pas vouloir entrer dans l’eau. Après m’avoir considéré longtemps, il se remit à quatre pattes et fit au trot le tour du lac, sans doute afin de chercher l’endroit le plus favorable pour s’y jeter.

La distance qui nous séparait n’excédait pas deux cents pas, car le lac n’en avait pas plus de quatre cents de diamètre. L’ours aurait pu m’atteindre aisément,