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peut servir à la descente dans un puits de mine : ce qu’il avait de cordes, des chaînes, même des bannes pouvant supporter le poids de quelques hommes pressés debout, l’un contre l’autre ; et muni de tous les moyens d’exploration souterraine qui étaient en son pouvoir, tels que lampes, appareils électriques, etc., qu’il avait eu le temps de faire hisser sur le plateau, lors de l’apparition des Coyoteros, il se rendit avec son monde sur le lieu de la découverte, où il fit immédiatement tout préparer pour la descente.

À quelques mètres de l’orifice du puits, qu’il fit élargir, il établit un treuil autour duquel on enroula tout ce qu’on avait de cordes et de chaînes, il fit attacher, fixer solidement, à l’extrémité du câble, une banne où quatre hommes pouvaient trouver place avec lui, et s’installa le premier dans cette banne, où un contremaître mineur et trois compagnons armés de pioches et de sondes le suivirent.

Pour que l’on pût se reconnaître dans cette obscurité, il donna l’ordre d’allumer les lampes, et la descente s’opéra prudemment, sans précipitation et sans encombre.

Le puits était profond. L’ingénieur, de cinquante pieds en cinquante pieds, se rendait compte, avec une satisfaction visible, de cette profondeur. Au bout d’un certain temps, la banne toucha le sol.

L’ingénieur et ses compagnons se trouvaient dans une sorte de rond-point, assez vaste, de forme un peu allongée, mais fermé de tous côtés par le roc. Pas d’issue ! Du moins c’est ce que l’ingénieur crut deviner, à la première inspection.

Il donna, cependant, l’ordre de sonder les parois et s’y mit lui-même, auscultant les murailles granitiques à tour de bras, avec le dos d’une pioche.

Soudain, il tressaillit. Il lui sembla que le fer, en retombant sur le roc, venait de rendre un son moins mat. Si c’était une illusion ?

L’ingénieur commanda le silence. Tous les marteaux cessèrent de s’abattre sur les parois. Seule, la pioche de l’ingénieur retomba sur le rocher, et, en effet, chacun reconnut que le choc produisait une sonorité prolongée. Renouvelée trois fois de suite, l’expérience ne se démentit pas. Il n’y avait plus à en douter : une galerie semblait devoir exister derrière cette muraille.

On attaqua le roc avec la sonde, d’abord, puis à coups de pic, avec une énergie extrême, et à mesure qu’il se creusait, sous ses efforts répétés, la sonorité devenait de plus en plus remarquable.

Tout en donnant de sa personne, l’ingénieur réfléchissait. Sa tête bouillait, ce qu’il supposait allait se réaliser !…

Tout à coup, son pic, au lieu d’être arrêté sur la paroi, rencontra le vide et s’y enfonça. Ce ne fut pas sans peine qu’il le retira. En approchant sa lampe de mineur, il vit que la muraille était percée.

Élargir la crevasse n’était point chose difficile. Chacun s’y mit. À mesure que le trou s’élargissait, il semblait aux hommes que de l’air frais venait jusqu’à eux.

Enfin l’ouverture fut bientôt assez, large pour donner passage à un homme.

L’ingénieur s’engagea le premier, la lampe à la main ; les autres le suivirent.

La galerie s’enfonçait horizontalement à travers la masse rocheuse. Ce n’était point un rêve : l’air y circulait. Ils le sentaient sur leurs visages couverts de sueur après une si rude besogne, et même l’ingénieur, qui marchait en avant, crut apercevoir un filet de lumière.

Le rayon s’élargissait au fur et à mesure. Bientôt ce fut une ouverture qui grandit, comme avait grandi le rayon, et quand l’ingénieur l’eut atteinte, il ne put retenir un cri de triomphe, en apercevant, à l’infini, à travers des broussailles entremêlées, l’étendue illimitée du llano.