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CHAPITRE XIII
CHEZ LES SIOUX


À mesure qu’ils approchaient de la rive droite de la rivière, Mac Diarmid et Evan Roy percevaient de plus en plus nettement un bourdonnement sourd qui s’élevait du camp indien, et qui se transforma, en devenant plus distinct, en un bruit de voix confus.

Le village, tout à l’heure si calme, était presque subitement devenu le théâtre de la scène la plus animée. Des centaines d’hommes sortaient de leurs huttes, et quelques-uns d’entre eux, voyant l’embarcation arriver, vinrent jusque sur la rive au-devant d’elle.

Les femmes étaient décemment habillées de robes de peau de daim, avec leurs cheveux nattés en longues tresses de chaque côté du visage. Les hommes portaient de grandes blouses de chasse et des bonnets de guerre à plumes, bordés d’écarlate, avec des guêtres et des mocassins dont la longue frange traînait sur le sol.

En prenant terre, Mac Diarmid rassembla d’un air digne les plis de son manteau et se dirigea vers l’intérieur du camp, suivi d’Evan Roy.

Les Indiens l’avaient accueilli avec une curiosité respectueuse, qui témoignait à elle seule de l’autorité qui lui était déjà acquise parmi les tribus.

Le camp s’étendait sur plusieurs acres de terrain. Au centre s’élevait un grand teepee entouré d’un large espace vide, et qui ressemblait plutôt à la tente d’un cirque ambulant qu’aux salles du Conseil ordinaire dans les villages indiens ; la seule différence était qu’au lieu d’être faite de toile, elle se composait d’un très grand nombre de peaux de buffle cousues l’une à l’autre avec le poil en dessous. Le dessus avait été peint en blanc, et sur ce fond un artiste indigène avait dessiné diverses scènes fantastiques, dans lesquelles les monstres mythologiques, les oiseaux, les bêtes et les hommes se trouvaient rapprochés et confondus.

Ce teepee, d’ailleurs absolument dénué de tout ameublement, comme on pouvait le voir par la porte largement ouverte, était la tente sacrée des Dakotas et venait d’être le théâtre de diverses cérémonies préparatoires, notamment une grande danse mystique, par laquelle les Indiens avaient préludé au Conseil extraordinaire convoqué pour ce jour.

C’est pour échapper au spectacle de ces pratiques grossières, répugnant à son esprit cultivé, que Mac Diarmid avait voulu retarder jusqu’à cette heure son retour au camp.

Il avait bien calculé son moment, car, en arrivant sur la place qui se développait devant la porte du teepee, il put voir une assemblée déjà nombreuse réunie autour d’un grand brasier allumé en plein air à une vingtaine de pas de la tente sacrée.

Cette assemblée était celle des délégués des tribus voisines, convoqués sur sa requête au camp des Dakotas pour recevoir les propositions qu’il comptait leur soumettre. Assis en demi-cercle autour du brasier, ils attendaient en silence, en fumant leur calumet, avec l’air grave et digne que les hommes du désert prennent toujours dans ces circonstances, et que commandait d’ailleurs l’importance des communications auxquelles ils avaient été préparés.

Autour d’eux une foule moins recueillie que ses chefs, quoiqu’elle n’échangeât ses impressions qu’à voix basse, se tenait debout et attendait aussi.

À peine l’approche de Mac Diarmid eut-elle été signalée, qu’un grand vieillard en cheveux blancs, couvert d’un manteau de fourrures d’opossum d’une grande richesse, se leva et vint au-devant de lui.