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vaux au centre et tous les chasseurs se préparant au combat.

Il va sans dire que les renseignements apportés par le capitaine eurent bientôt mis fin à cette alerte. Le commandant partit au-devant du détachement, tandis que Nettie, se réfugiant dans la tente de mistress Saint-Aure, épanchait dans le sein de sa cousine Juliette des craintes qu’elle n’avait pas le droit, pensait-elle, de garder pour elle-même.


CHAPITRE X
LE RAPPORT DU LIEUTENANT VAN DYCK.

Le commandant Saint-Aure eut bientôt rencontré le détachement qui revenait vers le fort, et, du plus loin qu’il l’aperçut, il l’examina avec une curiosité bien naturelle assurément.

Il voyait le lieutenant Van Dyck qui marchait en tête ; à l’arrière-garde, deux ou trois chevaux ou mulets tenus en laisse semblaient indiquer que la colonne avait subi des pertes ; les hommes paraissaient fatigués et tristes ; tout en eux annonçait de mauvaises nouvelles.

Le commandant n’eut garde pourtant de témoigner un empressement qu’il aurait cru déplacé. Il rendit froidement le salut que lui adressa son subordonné, et celui-ci, donnant à ses hommes l’ordre de faire halte, s’avança aussitôt vers lui :

« Colonel, j’ai l’honneur de vous remettre mon détachement, dit Cornélius. Nous avons poussé jusqu’à environ dix milles de la Pierre-Jaune, suivi diverses pistes, rencontré et balayé une bande de Sioux, en leur tuant trois hommes et leur prenant plusieurs poneys. En revanche, j’ai le regret d’ajouter que nous avons perdu le sous-lieutenant Armstrong et Flèche-Rouge, tous deux faits prisonniers par les Indiens.

— Dans quelles circonstances ? » demanda le commandant en fixant ses yeux perçants sur ceux de Yan Dyck.

Le jeune officier eut un instant d’hésitation, mais il reprit de son ton doucereux.

« M. Armstrong s’était séparé de nous. Il m’avait demandé l’autorisation de suivre une piste nouvelle, et il avait pris avec lui trois éclaireurs, Flèche-Rouge, le Renard-Agile et le Grand-Chien. Il était convenu qu’il nous rejoindrait sous trois jours à l’estacade du ruisseau de Hominy. Nous avons attendu trois jours, ce qui nous a permis de refaire un peu nos chevaux, et, le troisième jour, deux des éclaireurs partis avec M. Armstrong sont revenus. Comme ils nous informaient qu’il y avait une bande de Sioux dans le voisinage, j’ai cru devoir balayer ces Indiens sans retard, ce que nous avons fait la nuit suivante ; mon cheval a été blessé…

— Mais M. Armstrong, monsieur ? interrompit le commandant, d’un ton plein d’inquiétude. Vous me conterez le reste une autre fois… Les éclaireurs, dites-vous, sont revenus…

— Sans aucun message de M. Armstrong, colonel. D’après leur récit, il avait rencontré un contrebandier, un marchand de pelleteries, ou autre individu de cette sorte, et, en sa compagnie, était parti dans la direction du camp même des Sioux. »

Le commandant fit un geste de surprise et resta un instant comme absorbé dans ses réflexions.

« Et dans tout cela, monsieur, reprit-il enfin, qu’est-ce qui vous fait penser que M. Armstrong ait été fait prisonnier ?

— Il est impossible qu’il en ait été autrement dans un pays où les Indiens fourmillent, à la lettre, et où il s’aventurait seul… Nous-