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Richard avait rapporté que la forêt submergée était pleine d’arbres creux — quelques-uns ayant des fruits selon toute apparence mangeables — et tous ou presque tous enlacés d’ilianas formant un réseau si serré, qu’il serait facile de s’y faire un siège confortable parmi leurs branches ; or cela paraissait une amélioration assez sérieuse à leur première situation, puisqu’ils avaient été contraints jusqu’alors de se tenir debout ou à califourchon sur les rameaux horizontaux.

Chacune des ceintures avait été fabriquée avec le nombre de cosses vides approprié à la pesanteur de chacun. Aussi Ralph et Rosita n’en exigeaient pas autant que des hommes arrivés à leur maturité. Le transport de l’enfant fut particulièrement surveillé. L’Indien devait la prendre sous sa conduite spéciale.

Après avoir jeté des regards scrutateurs de tous les côtés du sapuçaya pour s’assurer qu’il ne surgissait pas de nouveaux obstacles au départ, on se mit définitivement en route.

Munday avait pris la conduite de la troupe avec la petite Rosita immédiatement derrière lui, l’Indien la soutenait au moyen d’un sipo attaché par un bout à sa ceinture et par l’autre autour de la taille de l’enfant. Trevaniow venait ensuite, Ralph un peu plus loin avec Richard, qui avait employé les mêmes moyens pour s’assurer la sûreté de son cousin.

Mozey et Tipperarv Tom venaient les derniers.


CHAPITRE VIII
Un souper de pigeons grillés. — Encore une fois sur l’eau. — L’igarapé. — Le bertholettia.


Guidés par le Mundrucu, les nageurs arrivèrent à l’arbre qui leur avait fourni leurs ceintures natatoires — le siphonia. — Il était maintenant silencieux comme la tombe. Pas un aras vivant ne s’y montrait. Les oiseaux échappés au sanglant combat des heures précédentes avaient abandonné la place.

Il ne fallait pas songer à aller plus loin pour la nuit, car le soleil semblait déjà prêt à se coucher. Le seringa offrait par son treillage serré un abri confortable, propre au sommeil. Enfin, si rude que fût leur nouvelle couche, on ne pouvait nier qu’il n’y eût amélioration sur celle de la nuit précédente.

Les volatiles suspendus à ses branches promettaient un souper qui n’était pas à dédaigner, car tous savaient apprécier la chair du papegeai. Les estomacs étaient si affamés, que plusieurs proposaient de ne pas attendre et de manger le rôti sans plus de préparation.

Trevaniow arrêta ces dispositions cannibales, et parla d’allumer du feu. Quel serait le procédé employé ? La question ne resta pas longtemps sans réponse, l’Indien promit de satisfaire bientôt au désir témoigné par le patron.

« Attendez dix minutes, patron, dit-il ; dans dix minutes vous aurez le feu-demandé et dans vingt, le « roastbeaf ».

— Mais comment ? nous n’avons ni briquet, ni amadou. Où en trouverons-nous ?

— Là-bas, répondit le Mundrucu ; vous voyez là-bas cet arbre, de l’autre côté de l’igarapé.

— Celui qui est seul, avec une écorce lisse et brillante, avec des feuilles semblables à de grandes mains blanches ? Eh bien ?

— C’est le imbaüba ; l’arbre qui nourrit le paresseux de l’Amérique du Sud.

— Oh ! alors, c’est celui qu’on connaît sous le nom de cecropia pellata. En effet, la forme de sa couronne décèle son espèce. Mais nous parlions de feu, Munday, est-ce que vous pensez en obtenir du cecropia ?

— En dix minutes, patron. Si vous me les