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ché de ce dénouement, fêta de son mieux le père et la sœur de la chasseresse Maranée, et après huit jours de repos, la petite caravane, escortée par un parti de guerre de ses Indiens, reprit la route des prairies, augmentée de Patrick, dont les blessures allaient mieux, et de Suvanée, qui s’était montrée pour lui une intelligente et affectueuse garde-malade.

On attacha de bons chevaux au wagon abandonné près de la butte Orpheline, et l’on se sépara du chef des Utahs et d’Archilète avec des démonstrations d’amitié, sincères de part et d’autre. Dans ces conditions de sécurité, le voyage ne pouvait être que facile, et d’ailleurs quand le bonheur fait partie des bagages, la route ne paraît jamais longue.

Édouard Warfield trouva au bureau de poste de Swampville une lettre bordée de noir qui l’attendait depuis plus d’un mois. Sa vieille tante était morte, et lui laissait un petit héritage.

Au bout de quelques années, la clairière Holt n’était plus reconnaissable. La butte en planches était remplacée par une belle maison de pierre avec véranda et portique ; le petit champ de maïs était devenu une superbe plantation, et on n’aurait pas reconnu le rude squatter dans le respectable gentleman qui, monté sur un cheval et son rifle sur l’épaule, surveillait les abatis de bois et la coupe des moissons de blé.

Une autre maison s’élevait plus loin, au bout d’une verte allée d’arbres ; c’était la demeure de Marian et de Wingrove. L’ex-rifleman avait fort à faire pour remplir son fameux programme de « chanteur de rondes aux babys », car il avait à bercer de ses ballades non seulement les enfants roses et blonds du capitaine, et les beaux enfants bruns de Wingrove, mais encore les siens.

Suvanée s’était laissé charmer non pas par les cheveux jaunes de Sure-Shot, mais par son caractère sûr et aimable. Quant à Patrick, sa nature moutonnière, bien caractérisée par son ami, l’avait porté à offrir son cœur et sa main à toutes les Chicassaws de la forêt ; mais aucune d’elles n’avait voulu d’un mari scalpé, et le pauvre Irlandais avait fini par se résigner à n’épouser personne.

« Mais qu’importe, disait-il philosophiquement à son ami, en regardant la joyeuse troupe des enfants de la colonie s’ébattre dans les grandes herbes : Est-ce qu’il ne fallait pas un oncle ou quelque chose qui en tînt lieu à tous ces petits-là. — L’oncle Patrick n’a pas à se plaindre. Ce n’est pas la besogne qui lui manque. « En ai-je assez à débarbouiller de ces petits nez en tous les genres, » dit-il dix fois par jour.

Sure-Shot et Patrick étaient, on le voit bien revenus de la fièvre de l’or ; et la petite colonie prospérait si bien, qu’elle est peut-être devenue maintenant, sous l’œil de Dieu, le centre d’un seulement plus important que Swampville.

FIN DES DEUX FILLES DU SQUATTER.