Page:Reid - Aventures de terre et de mer, Hetzel, 1891.djvu/476

Cette page n’a pas encore été corrigée

après avoir calculé toutes ces chances qu’il trouvait désavantageuses.

« Wa-ka-ra est d’un naturel généreux, dit-il à Marian. Pourquoi ne lui confieriez-vous pas le secret de notre expédition ? peut-être consentirait-il à nous aider. Le voilà qui revient avec le gros de ses troupes, et il a l’air heureux d’un triomphateur. La journée a été bonne pour lui. Il a vengé Walker ; il a tué son ennemi personnel et procuré de la gloire à sa tribu. Il doit être dans une disposition d’esprit généreuse.

— Je doute qu’il puisse nous aider, répondit Marian. Les Mormons se sont mis en bons termes avec les Utahs afin de s’assurer un libre passage dans les prairies, et Wa-ka-ra leur a promis de ne molester aucun de leurs trains. Or, Wa-ka-ra est esclave d’une parole donnée, et il faudrait une agression des Mormons contre sa tribu pour qu’il se décidât à les attaquer. Mais il ne sera pas dit que je reculerai devant une simple démarche à faire dans l’intérêt de Lilian, lorsque vous avez déjà couru tant de dangers pour la délivrer. »


CHAPITRE XIX
L’envoyé des Mormons. — Les faux Indiens. — Projets d’avenir de Sure-Shot.


Wa-ka-ra n’attendit point que la chasseresse allât jusque-là, car il venait justement de ce côté pour visiter les hommes blancs qu’il avait délivrés et leur offrir ses services. Il la rejoignit à cent pas environ de la butte Orpheline, au pied de laquelle étaient demeurés Édouard Warfield et Franck Wingrove, et il écouta d’un air un peu soucieux la requête que lui présentait sa protégée ; elle lui parlait encore lorsqu’un grand mouvement se fit parmi les guerriers utahs restés en arrière, et leur ligne se brisa pour laisser passer un cavalier indien, lancé à toute vitesse et auquel toutes les mains désignèrent le chef quand il traversa le petit bataillon.

L’Indien s’avança vers Wa-ka-ra et mit pied à terre pour lui parler. Marian Holt se retira par discrétion et revint annoncer à ses amis qu’elle avait trouvé le chef très indécis, plein de bonne volonté à leur égard, mais soucieux de garder la foi jurée.

An bout de quelques minutes de conversation avec le cavalier, Wa-ka-ra le congédia du geste et rejoignit les hommes blancs en leur montrant une figure enjouée.

« La journée a été bonne pour nous, leur dit-il, et je suis heureux d’être arrivé à temps pour sauver vos scalps… Ne me remerciez point. C’est moi qui suis votre obligé, car je n’aurais jamais supposé que la Main-Rouge viendrait rôder avec si peu de guerriers auprès du campement des Utahs. Je voudrais vous prouver ma reconnaissance. Maranée vient bien de m’en indiquer le moyen ; mais il y a des difficultés. La parole d’un homme rouge vaut celle d’un homme blanc, et j’ai donné la mienne. Cependant, vous devez trouver, Maranée, que j’ai une meilleure figure que tout à l’heure, car un homme fait une triste mine quand il est obligé de refuser quelque chose contre son cœur à un ami et surtout à un hôte. Or, vous avez habité six mois parmi nous, Maranée, vous m’avez été confiée par mon bienfaiteur, vous avez tout droit à me demander aide et appui. Voici comment je puis vous être utile sans manquer à mes engagements. Je n’ai trouvé ce moyen que tout à l’heure, et voilà pourquoi vous me voyez si content. L’homme qui vient de me parler est un messager des Mormons. Le train n’a pas su trouver la passe Coochetapa, et il est arrêté dans